CANADA

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Date de parution : 5 septembre 2013

Format : Broché

Extrait D’abord, je vais raconter le hold-up que nos parents ont commis. Ensuite les meurtres, qui se sont produits plus tard. C’est le hold-up qui compte le plus, parce qu’il a eu pour effet d’infléchir le cours de nos vies à ma soeur et à moi. Rien ne serait tout à fait compréhensible si je…

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Quatrième de couverture

Extrait

D’abord, je vais raconter le hold-up que nos parents ont commis. Ensuite les meurtres, qui se sont produits plus tard. C’est le hold-up qui compte le plus, parce qu’il a eu pour effet d’infléchir le cours de nos vies à ma soeur et à moi. Rien ne serait tout à fait compréhensible si je ne le racontais pas d’abord.
Nos parents étaient les dernières personnes qu’on aurait imaginées dévaliser une banque. Ce n’étaient pas des gens bizarres, des criminels repérables au premier coup d’oeil. Personne n’aurait cru qu’ils allaient finir comme ils ont fini. C’étaient des gens ordinaires, même si, bien sûr, cette idée est devenue caduque dès l’instant où ils ont bel et bien dévalisé une banque.

Mon père, Bev Parsons, était un gars de la campagne, né dans le comté de Marengo, Alabama, en 1923 ; il avait quitté l’école en 1939, brûlant d’entrer dans l’armée de l’air, ce corps qui est devenu l’Air Force. Il a intégré Demopolis, fait ses classes à Randolph, près de San Antonio, et il voulait à tout prix être pilote de chasse mais, n’en ayant pas les capacités, il a appris à piloter un bombardier. Il pilotait les B-25, les Mitchell poids léger, qui ont servi aux Philippines, puis à Osaka, où ils faisaient pleuvoir la destruction sur terre – frappant l’ennemi comme l’innocent. C’était un grand gaillard sympathique, souriant, bel homme, de plus d’un mètre quatre-vingts (il tenait tout juste dans l’habitacle du bombardier), avec un visage large et carré tourné vers autrui, des pommettes saillantes, une bouche sensuelle et de longs cils de fille, superbes. Il avait des dents d’une blancheur éclatante et des cheveux noirs coupés court dont il était très fier, comme il était fier de son prénom, Bev. Capitaine Bev Parsons. Il n’a jamais voulu reconnaître que Beverly était un prénom féminin pour la plupart des gens. C’était d’origine anglo-saxonne, disait-il. «Très courant en Angleterre, il y a des hommes qui s’appellent Vivian, Gwen et Shirley, là-bas. Et on ne les confond pas avec des femmes pour autant.» C’était un causeur impénitent, l’esprit ouvert pour un sudiste, des manières affables et obligeantes qui auraient dû le mener très loin au sein de l’Air Force, mais qui ne l’ont mené nulle part. Ses yeux vifs, noisette, parcouraient la pièce où il se trouvait pour y découvrir un auditoire – ma soeur et moi en général. Il racontait des blagues ringardes avec un cabotinage typiquement sudiste, il connaissait des tours de cartes et des tours de magie, il arrivait à détacher la première phalange de son pouce et à la remettre en place, il savait faire disparaître et revenir un mouchoir. Il jouait du boogie-woogie au piano et parfois il nous parlait «dixie», ou bien comme dans Amos ‘n’ Andy. Il avait perdu un peu d’audition en pilotant les Mitchell et il était susceptible sur ce chapitre. Mais il était rudement chic avec sa coupe d’«honnête» GI et sa tunique bleue de capitaine ; en somme, il dégageait une chaleur sincère qui faisait que ma soeur jumelle et moi, on l’adorait. C’est d’ailleurs sans doute ce qui avait attiré ma mère (même s’ils étaient aussi différents, aussi désassortis que possible, tous les deux) qui était par malchance tombée enceinte dès leur première rencontre, expéditive, après une soirée en l’honneur des aviateurs rentrés du front, non loin de l’endroit où il se recyclait en directeur de l’approvisionnement, à Fort Lewis, en mars 1945, ses services de largueur de bombes n’étant plus requis. Ils s’étaient mariés dès qu’ils s’en étaient aperçus. Ses parents à elle, des juifs polonais émigrés qui habitaient Tacoma, n’étaient pas ravis. Gens instruits, professeurs de mathématiques, musiciens semi-professionnels – ils donnaient des petits concerts très courus à Potsdam, qu’ils avaient quitté en 1918 pour s’installer dans l’État de Washington via le Canada -, ils étaient devenus, hasards de la vie, concierges d’école. Être juifs ne voulait plus dire grand-chose pour eux à l’époque, ni pour notre mère, et renvoyait surtout à un mode de vie étriqué, vieillot et contraignant qu’ils n’étaient pas fâchés d’avoir laissé derrière eux en émigrant dans un pays apparemment exempt de juifs.

Caractéristiques

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EAN : 9782823600117

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Format : Broché

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Poids : 0.568 kilogrammes

Taille : 3.3 cm x 14.9 cm x 22.1 cm

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